Nos Financiers de Haut-Vol seraient ils fautifs?

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Le scandale du Libor continue.

Je reviens une seconde sur une idée reçue de celui qui ne connait rien à la finance: prendre des parts en actionnariat dans une entreprise, ce n'est pas investir dedans. Il n'y a rien de philanthropique dans l'action, certes, cela est censé accroître le capital de l'entreprise.
Mais d'une part, le jeu de la bourse fait que la valeur réelle des richesses créées par l'entreprise est vite perdue de vue. Cotée en Bourse, ladite entreprise peut se retrouver avec une valeur très supérieure ou inférieur à la réalité. C'est un mécanisme pervers. Le but est de pouvoir tirer le maximum de bénéfices de l'opération, il n'y a aucun scrupule de la part du boursicoteur de retirer ses billes ou de faire pression, même si l'entreprise doit licencier et couler pour cela.

Investir dans le capital travail d'une entreprise, ce n'est pas cela du tout. Il y a des personnes qui sont encore spécialisées dedans. Elles achètent une entreprise en difficulté, la remettent à flot et la revendent ensuite. D'autres partagent les bénéfices avec l'entrepreneur une fois tout payé. C'est donc très différent de l'actionnariat financier, qui devrait, à mon sens, être considéré de la même façon que le système bancaire sur lequel il s'appuie.


Le Nouvel Observateur s'insurge contre la finance avec ce titre aguicheur: la finance, c'est du vol.
En fait, il faut arrêter de penser en terme de moralité ou de principes moraux dans le domaine de la finance. Les intérêts des particuliers, soient les actionnaires, l'emportent sur les considérations sociales.
Preuve en est la liste des personnes par lesquelles les malversations sont apparues, même dans des banques à haute réputation comme Barclays et Bank Royal of Scotland:

 Philippe Moryousse(...) Ce trader aurait ainsi contacté Michael Zrihen du Crédit Agricole, Didier Sander chez HSBC et Christian Bittar de HSBC. L'identité de l'employé suspect de la Société Générale reste floue, indique le FT qui précise que ces personnes ne travaillent plus pour les banques en question.

Le trading, l'actionnariat, la banque, font appels à la plus grande des destructurations sociales et morales qui soient. De la même manière qu'un créancier "moral"(ici une belle confusion linguistique), tel votre conseiller bancaire qui vous appelle et vous harcèle, on apprend vite à penser en termes de profits et rentabilité, un égoïsme et un égocentrisme forcé sont de mise partout.

Un Exemple:
Un huissier ne peut être humain et prendre pitié d'un débiteur au bord de l'exclusion: il ne rapporterait rien à sa société et ses clients.

En Espagne, au début de la crise, on nous a montré des sociétés payées uniquement pour suivre les fautifs et clamer sur la place public qu'ils avaient des dettes.
Généralement, les personnes harcelées finissaient par craquer et payer le plus possible, au détriment de leur situation souvent désespérée.
Dans notre système de valeurs (hors financières), il y a ceux qui font payer et les autres qui doivent payer coûte que coûte, l'expression ici est bien révélatrice. Ceux qui ne peuvent payer sont forcément coupables quelque part. Il y a les forts et les faibles, et les faibles ne sont jamais valorisés. Ils portent en eux une espèce de péché vis-à-vis des créanciers, qui sont perçus comme dominants et donc valorisés.
Il n'est donc pas étonnant qu'un racisme anti-riches se développe fortement, par réaction contre le système.


Car le banquier se place en donneur de leçons, suspecte même le débiteur d'avoir une vie dissolue. Vos coups durs ne l'intéressent pas. Il ne se sent nullement responsable de quoi que ce soit. Même si votre situation au bord de la faillite est très lucrative pour lui, même si les prêts que vous avez contractés y sont pour quelque chose, même si c'est lui qui a failli puisque vous lui avez confié votre salaire ou vos avoirs, et que c'est lui qui vous doit des comptes, pas le contraire...


On a bien vu l'inversion des valeurs dans les années précédentes: quand les banques plongent du fait de leurs erreurs, les gouvernements paient. Nous payons tous pour leurs fautes alors que nos découverts nous sont facturés au prix fort.

Des nouvelles banques ont vu le jours ces derniers temps: ce sont des banques équitables ou dites morales. Ce qui prouve bien que le système bancaire n'est ni équitable ni moral au fond.

Alors, nos financiers seraient-ils des escrocs de haut-vol ? Cela dépend de quel point de vue nous nous plaçons. Qu'ils n'hésitent pas à des moments à enfreindre la loi n'est pas étonnant.
Nicolas parlait récemment de remettre à plat certaines de nos valeurs, notamment celles du travail et la façon dont nous l'envisageons.
Il a raison.
Quelque part, notre situation me rappelle la fable de la tortue et du scorpion:

Un scorpion au bord de l'eau supplie une tortue de l'emmener sur l'autre bord, puisqu'il ne sait pas nager. La tortue lui répond: "mais si je te prend sur mon dos, tu vas me piquer pour me tuer".

Le scorpion lui dit:"mais non, voyons, je ne suis pas bête, si je te pique, on coule tous les deux."

La tortue accepte de le monter sur son dos, ils traversent la rivière.

Au milieu de la traversée, le scorpion pique la tortue.

Avant de se noyer paralysée par le venin, la tortue lui demande: "mais pourquoi as-tu fait ça? nous allons mourir tous les deux..."

Et le scorpion de répondre: "c'est dans ma nature".

 Si le banquier était le scorpion et les entreprises la tortue, alors le banquier mentirait clairement: mais personne ne dénonce vraiment le mensonge.On continue à accuser la tortue de faire exprès de couler.

image extraite de http://www.pinktaxiblogger.com/2011/07/la-tortue-et-le-scorpion.html