Autour de Mandela, l'hommage mais aussi les duplicités et lâchetés en tout genre

Il y a un type dont les médias n'ont pas parlé, en France, un mec qui a fait énormément pour la lutte contre l'Apartheid, dans les années 80, alors que c'était très mal vu de boycotter des simples oranges en ce temps-là. Oh, dans les écoles, on ne parlait guère de l'Afrique du Sud, tout au plus, ailleurs on avait l'image de ces blacks pauvres, sales, qu'on savait vaguement opprimés.
C'est une réalité dont on ne veut pas parler en ce moment. C'est pourtant la vérité.
La France a  soutenu le régime d'Apartheid et contrairement à ce que dit cet article en préambule, la France n'a connu Mandela qu'à travers des musiques étrangères et des auteurs comme Simple Minds, U2, Peter Gabriel, Phil Collins etc...et surtout Renaud, quand il décide d'écrire sur Mandela, et de faire venir Johnny Clegg.

En juin 1991, les dernières lois de l'Apartheid tombent, nous étions sous François Mitterrand, le Mur de Berlin était tombé depuis 2 ans, L'URSS continue sa transition vers la Fédération de Russie, mais Georges Bush est élu homme de l'année aux USA, le Liban est toujours déchiré, la Première Guerre du Golfe passe sur l'Irak, engendrant plus tard un blocus et des corruptions qui feront un millions de victimes parmi les enfants.

Le Monde était déjà aussi complexe que maintenant. Nous nous sommes réjouis de la libération de Mandela, et nous étions étonnés de voir l'Apartheid tomber. Ce système, garanti par des lois qui semblaient si intangibles, des murs qui séparaient deux groupes sociaux ethniques différents, amenant les ghettos et les violences, les tortures des militants anti-apartheid, y compris blancs, la suprématie Afrikaner de colons européens venus s'installer là, le tout érigé en lois, ce système tombait. Voilà ce qu'est l'apartheid, qui n'est pas mort le 30 juin 1991.
De tout ceci, dans les années 80, on en parlait peu. C'était très mal vu de défendre les blacks de l'ANC, qui se battaient contre avec les moyens qu'ils avaient, ainsi que les blancs qui les soutenaient.

Renaud Séchan a eu le cran d'en parler, et de faire beaucoup pour faire tomber le mur du silence autour de la dénonciation et du boycott de l'Afrique du Sud. On peut reconnaître à Mitterrand le courage de ne pas être aller contre ce mouvement international de solidarité et de lutte contre l'Apartheid. On peut reconnaitre à Mitterrand le fait d'avoir autorisé un bureau à l'ANC en 1981 à Paris. Oh, oui, l'embargo d'armes est décrété en 1977 en France mais il n'est pas réellement appliqué.

Renaud était de gauche, Mitterrand était de gauche, à ce moment-là, la gauche se positionnait clairement contre les oppresseurs de tous les peuples. Si Mitterrand resserra les liens avec Israël, d'un autre côté, il apporta un soutien indéfectible à l'OLP et à Yasser Arafat, pour citer un autre exemple, malgré les pressions en tout genre. Ce fut à l'honneur de Mitterrand, et de la France, de soutenir ces mouvements de libérations des peuples contre l'Apartheid, les Apartheid. Ce combat n'est pas terminé partout, il est international, l'Apartheid existe encore en Israël, en Birmanie, en Australie (dans une moindre mesure) et encore ailleurs, d'une manière insidieuse, chaque fois que des lois viseront spécifiquement un groupe ethnique ou social identifié, en le séparant du reste de la population, visant sa disparition par sociocide ( la volonté d'assimilation de ce groupe en lui enlevant sa culture propre ).

Alors, quand Marine Le Pen fait un hommage à Mandela, elle qui veut mettre dehors tous les "étrangers", soit tous ceux qui ont une culture sensée être différente de la sienne, même s'ils sont français....Alors, quand Georges Bush vient foutre les pieds en Afrique du Sud, lui, le père de la politique américaine de l'Axe du Bien, et de Guantanamo, alors que Mandela a été ôté de la liste des terroristes en 2008....Quand certains, en France, viennent se dire des soutiens de l'ANC de la première heure...

Comme disait les Anciens, cause toujours, tu m'intéresses. Ou aussi, parle, beau merle...En gros, tu discutes mais qu'est-ce que tu fais concrètement contre ce que tu dénonces, c'est bien beau les discours mais c'est quand que tu agis concrètement?

Mandela, c'est aussi les rencontres avec Mohammed Ali, avec Yasser Arafat, même avec le Dalaï Lama . Mandela, c'est aussi la lutte contre l'Apartheid en Palestine, c'est un homme qui a été soutenu par des pays du Tiers Monde qui sont encore soupçonnés de tous les maux, comme Cuba, par exemple, alors qu'on se demande ce que veut dire vraiment cette omerta contre ces pays: j'ai toujours dit qu'on ne pouvait juger quels pays étaient des "méchants" quand notre démocratie est aussi peu parfaite...en punissant tout le peuple pour les agissements de son chef qu'on sait élu non-démocratiquement...

Or, Mandela c'est aussi ça : c'est ne pas juger et punir tout un groupe en vertu du système dans lequel il vit, même si ce système vient de ce groupe-même, mais faire tomber ce système.
Aussi, Mandela a agi contre le système d'apartheid israélien, en tant que Président, en tant qu'homme, par justice et contre le racisme et les discriminations. Mandela croyait qu'il fallait faire tomber les axes du système, pas les victimes de ceux-ci, dans lesquels se trouvent aussi les Israéliens en ce moment:

“Les Nations-Unies ont pris un fort parti-pris contre l’apartheid et au fil des années, un consensus international fut construit, consensus qui aida grandement à mettre un terme à ce système inique. Mais nous savons tous très bien que notre liberté est incomplète sans la liberté des Palestiniens.”  

4 Décembre 1997

Mais ne pas lutter contre l'Apartheid en Israël, qui est aussi le système le plus abouti de colonialisme ultime, et aller se recueillir devant la dépouille de Nelson Mandela, est à l'encontre de tous les principes de vie de cet homme.

D'ailleurs, en France, on ne s'y trompe pas. Les extrémistes de la droite nationaliste et du FN s'en donnent à cœur joie.
Notre nouvelle Miss France, Flora Coquerel, est harcelée en ce moment sur le web, simplement parce qu'elle est métisse.
Alors, c'est bien beau d'aller faire son petit tour afin de rendre hommage à Nelson Mandela, dit Madiba, dit Tata, mais si on revient chez nous et qu'on ne fait rien contre ce qui se passe chez nous...et aussi dans le Monde...
On se demandera quel type d'homme ne rentrera jamais dans l'Histoire, en définitive...


Je sais, il faut du courage pour dire les choses telles qu'elles sont et surtout, agir.
C'est difficile car beaucoup ont peur. Peur de ce qu'on va dire d'eux, les reproches, les ennuis qu'on pourrait s'attirer, ici, en France. On me l'a déjà dit, en privé, mais je crois que c'est dans l'esprit de Mandela de dire ce qui est marqué dans cette illustration, issue d'Anonymous Art of Revolution:

"Si tu es effrayé de parler contre la Tyrannie, tu es déjà un esclave."