Utopie

L'utopie n'est pas un luxe, c'est une nécessité.

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lundi 18 juin 2012

Est-ce ainsi que les hommes vivent

http://petitemimine.centerblog.net/
 Un texte magnifique, encore maintenant. Je suis heureuse de trouver la version de Lavilliers, qui chante Aragon.
En effet, j'ai beaucoup de mal avec Léo Férré, il me fout le bourdon, je n'aime pas sa façon de chanter.
Le texte est cru, libre, presque sauvage. On ne peut que remarquer les figures de style, les évocations du plaisir et des violence mélangés dans un tourbillon somptueux.
L'homme: coupable du pire, capable du meilleur.
Capable d'aimer jusqu'à l'absolu et coupable de la destruction la plus totale...
L'homme est une promesse qui se termine souvent en cauchemar. Mais sans les cauchemars, les rêves ne peuvent exister.

Tout est affaire de décor
Changer de lit changer de corps
A quoi bon puisque c'est encor
Moi qui moi-même me trahis
Moi qui me traîne et m ‘éparpille
Et mon ombre se déshabille
Dans les bras semblables des filles
Où j'ai cru trouver un pays

Cœur léger cœur changeant cœur lourd

Le temps de rêver est bien court
Que faut-il faire de mes jours
Que faut-il faire de mes nuits
Je n'avais amour ni demeure
Nulle part où je vive ou meure
Je passais comme la rumeur
Je m'endormais comme le bruit

Est-ce ainsi que les hommes vivent

Et leurs baisers au loin les suivent

C'était un temps déraisonnable

On avait mis les morts à table
On faisait des châteaux de sable
On prenait les loups pour des chiens
Tout changeait de pôle et d'épaule
Le pièce était-elle ou non drôle
Moi si j'y tenais mal mon rôle
C'était de n'y comprendre rien

Dans le quartier Hohenzollern

Entre la Sarre et les casernes
Comme les fleurs de la luzerne
Fleurissaient les seins de Lola
Elle avait un cœur d'hirondelle
Sur le canapé du bordel
Je venais de m'allonger près d'elle
Dans les hoquets du pianola

Est-ce ainsi que les hommes vivent

Et leurs baisers au loin les suivent

Le ciel était gris de nuages

Il y volait des oies sauvages
Qui criaient la mort au passage
Au-dessus des maisons et des quais
Je les voyais par la fenêtre
Leur chant triste entrait dans mon être
Et je croyais y reconnaître
Du Rainer Maria Rilke

Elle était brune et pourtant blanche

Ses cheveux tombaient sur ses hanches
Et la semaine et le dimanche
Elle ouvrait à tous ses bras nus
Elle avait des yeux de faïence
Et travaillait avec vaillance
Pour un artilleur de Mayence
Qui n'en est jamais revenu

Est-ce ainsi que les hommes vivent

Et leurs baisers au loin les suivent

Il est d'autres soldats en ville

Et la nuit montent les civils
Remets du rimmel à tes cils
Lola qui t'en iras bientôt
Encore n verre de liqueur
Ce fut en avril à cinq heures
Au petit jour que dans ton cœur
Un dragon plongea son couteau

Est-ce ainsi que les hommes vivent

Et leurs baisers au loin les suivent
Comme des soleils révolus.

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