8 Mars 2013 : la moitié de l'Humanité et des fleurs

 

Quand j'étais petite, je ne comprenais pas trop cette journée, et ce qu'elle voulait dire. Pour moi, je croyais que c'était comme la fête du printemps, avec des roses, pourquoi je pense à cette journée chaque fois, avec des roses qui me viennent à l'esprit, je n'en sais rien.
Je croyais que c'était comme la fête des Mai, ceux qui ont un peu de culture médiévale et rurale comprendront. C'est le jour où on fête les beaux jours et les jeunes hommes déposent des bouquets de fleurs devant les maisons des jeunes filles, en hommage. Un de ces jours qu'on a oublié un peu, dans l'histoire, pas une coutume barbare. Selon les régions, cela se passe différemment, parfois cela veut dire que la jeune fille est un beau parti, ou que c'est une belle jeune femme, ou que le plus beau bouquet donne à celle qui le reçoit un statut spécial....
Je croyais donc que c'était la fête des Mai en avance. Tiens, j'ai vu qu'à Nice, ils la fêtent

Pour revenir à ce jour, on m'a ensuite expliqué que cela voulait dire que cette journée célébrait le droit des femmes ou de la femme. Bref, que c'était pour expliquer qu'on avait été brimé et qu'on était encore brimé, en tant que femme....Du coup, j'aimais pas trop. On nous ressassait cela à la télé un jour par an, et je ne comprenais pas pourquoi, moi, une jeune adolescente, je devais forcément me battre puisque j'étais traitée encore en inférieure...Je n'avais aucune envie, je ne me sentais ni inférieure, ni supérieure, en fait, je n'avais aucun complexe dans ma vie avec ma condition de jeune femme. Mais j'étais déjà très concernée par la pauvreté dans le monde, baignant dans un milieu catholique très militant d'un côté et dans l'intersyndicale internationale de l'autre.
J'avais vu mes deux grands-mères, l'une étant la patronne en tant que pharmacienne en titre, et l'autre dirigeant toute l'exploitation familiale et la tribu d'une main ferme, agir comme des femmes de tête respectées,  presque toutes mes tantes et ma mère travaillaient, parfois certains maris se faisaient marcher sur les pieds par leurs femmes en beauté....

Devenue étudiante, j'ai toujours eu du mal à séparer les exactions faites sur les femmes des exactions faites sur les plus faibles. La Journée des Femmes m'agaçait, comme la journée sans tabac...Et puis, j'ai muri. J'ai compris que cela pouvait aussi commémorer une mémoire, celle de certaines femmes qui ont aidé dans la Résistance, comme d'autres hommes, ce qui fait qu'en 1945, nous avons obtenu le droit de vote, j'ai compris que cela commémorait aussi le droit à l'avortement, le droit aux contraceptifs....

Et puis, je ne peux m'empêcher de penser que si cette journée fait du bien à certains, elle ne fait pas de mal aux autres.
C'est cela aussi, lorsqu'on a vécu un peu. Savoir respecter les autres. Et respecter aussi la mémoire des pionnières, celles qui ont fait que je peux m'exprimer ici, en toute égalité, sans avoir à demander l'accord de mon mari, ce qui aurait été le cas au début du XIXème siècle, si j'avais eu la possibilité d'écrire quelque part sur un quelconque support.

illustration : une grande femme qui s'appelait Gabriel Chanel dite Coco. Elle aussi fit pas mal pour libérer le corps des carcans d'une mode ingrate.